Zoom sur la glycine – un complément aussi important que méconnu

Sommaires

La plupart d’entre nous connaissent à l’heure actuelle l’importance des protéines pour l’organisme et pour la santé. En effet, les protéines sont des composants absolument cruciaux qui remplissent énormément de fonctions au sein de l’organisme ; développement musculaire, synthèse osseuse, production hormonale, régulation des neurotransmetteurs ou encore de la fonction immunitaire. Bref les protéines c’est absolument crucial et il y a de bonnes raison de penser que les recommandations en matière d’apport nutritionnels (0.83gr/kg/jour chez une personne sédentaire et saine) sont trop faibles.

Mais c’est quoi en fait une protéine ?

Schématiquement, une protéine représente un collier de perles ou chaque perle représente ce que l’on appelle un acide aminé.

Structure primaire d’une protéine

Ces acides aminés sont au nombre de 20 dans l’organisme. 9 d’entre eux sont qualifiés « d’essentiels » car le corps ne sait pas les fabriquer et qu’ils doivent par conséquent être apportés via l’alimentation. A l’inverse, les 11 autres sont appelés « non-essentiels » car le corps sait les fabriquer via différents processus.

Le cas de la glycine

C’est justement le cas de la glycine, et c’est la que ca devient intéressant. En effet la glycine est considéré comme le plus important des acides aminés non-essentiels car il représente à lui tout seul 12% des acides aminés totaux au sein du corps humain (1).

Dans l’organisme, la glycine est obtenue à partir d’autres acides aminés tels que la sérine, la choline ou encore la thréonine (2). Un premier problème apparait cependant ici ; la production endogène de glycine est perturbée et freinée par de nombreux processus enzymatiques complexes (que nous ne détaillerons pas ici). La disponibilité de la glycine au sein du corps diminue ainsi, alors que les rôles de la glycine au sein de l’organisme sont nombreux.

En 2009, des chercheurs espagnols (3) ont ainsi calculé que le corps produisait environ 3gr de glycine par jour, et que l’alimentation moderne en apportait la plupart du temps entre 2 et 3gr. Pour les personnes consommant beaucoup de protéines, cette valeur peut atteindre 6gr alors que pour les personnes n’en consommant que peu, elle peut descendre en dessous des 2gr.

Résultat : nous sommes tous carencés à hauteur de 10gr/jour en glycine et la glycine devrait être considérée comme un acide aminé semi-essentiel !

Glycine et alimentation moderne

Comment cela s’explique me direz-vous ?

Ma foi assez facilement. En effet, nos ancêtres du paléolithiques ayant vécu de 2 millions d’années jusqu’à 12 000 ans avant notre ère, avaient pour habitude de consommer l’intégralité des animaux qu’ils tuaient lors de la chasse. Ils consommaient ainsi la peau, le cartilage, la moelle osseuse et de nombreuses autres parties très riches en glycine.

Dorénavant, à moins que vous soyez vous-même chasseur-cueilleur (si c’était le cas vous ne seriez probablement pas en train de lire cet article…), vous ne consommez que très rarement voir pas du tout ces aliments. Dans son ouvrage Paléo nutrition, Julien Venesson explique ce phénomène en détail.

L’alimentation préhistorique était très riche en glycine, bien plus qu’actuellement…

Mais pourquoi cela est-il si important ? quelles sont les fonctions que remplit la glycine au sein du corps humain ?

L’importance de la glycine dans l’organisme

Premièrement, la glycine possède un rôle important dans la régulation du sommeil. Consommée avant le coucher, elle permettrait en effet d’abaisser la température corporelle et ainsi de favoriser l’endormissement et la survenue du sommeil profond (4)(5).

En plus d’améliorer la qualité du sommeil, ou plutôt par voie de conséquence, la consommation de 3gr de glycine avant d’aller dormir diminuerait également les niveaux de fatigue lors des jours suivants, notamment chez les individus souffrant d’insomnies ou de troubles du sommeil (6). Chez les personnes âgées, il semblerait qu’une supplémentation en glycine, en association ou non avec de la N-acétylcystéine, améliore la cognition (7).

Prends de la glycine et tu dormiras comme ca..

Sur le plan articulaire, la glycine pourrait également s’avérer être un précieux allié. En effet, la glycine est responsable à elle seule de 30% de la synthèse du collagène (avec la proline et l’hydroxyproline). Or le collagène est la protéine la plus présente dans l’organisme et le constituant de base des muscles, des os, des cartilages ou encore de la peau. Une supplémentation en glycine permettrait donc d’améliorer le renouvellement du cartilage, de soutenir la guérison des tendons ou encore de limiter l’arthrose et les maladies dégénératives des os et du cartilage. Bien que peu d’études soient disponibles dans les banques de données à ce sujet, je vous invite à aller consulter les travaux de l’université de Tenerife et de Grenade à ce sujet, notamment ceux de Patricia de Paz Lugo.

En ce qui concerne la fonction musculaire, il faut savoir que la glycine est l’un des 3 acides aminés (avec l’arginine et la méthionine) nécessaire à la production endogène de créatine. Rappelons que la créatine est l’un des carburants préférés de l’organisme pour les efforts très courts et très intenses. La supplémentation en créatine permettant de manière unanime une augmentation de la force et de la masse musculaire, il y a de bonnes raisons de penser qu’une supplémentation en glycine pourrait avoir un impact similaire ; la glycine est en effet le facteur limitant de la synthèse de créatine dans l’organisme. L’impact d’une supplémentation en glycine sur la production de créatine n’a toutefois pas/peu été étudiée au niveau scientifique.

Enfin, la supplémentation en glycine semblerait avoir un impact positif sur une condition appelée syndrome métabolique (8). Le syndrome métabolique se caractérise entre autres par un tour de taille anormalement élevé, un taux de cholestérol HDL très bas, une concentration élevée en triglycérides sanguin, une tension artérielle élevée ainsi qu’une hyperglycémie chronique, conséquence d’une résistance à l’insuline et de l’apparition progressive d’un diabète de type 2. Le syndrome métabolique est quelque chose de très fréquent puisqu’il toucherait 1 américains adulte sur 3 (9). La glycine aiderait en effet à diminuer l’inflammation chronique concomitante au diabète de type 2 et à l’obésité et permettrait une meilleure sensibilité à l’insuline chez les personnes présentant un certain niveau de résistance à cette hormone.

Comme vous le voyez au sein de cet article, la glycine possède de nombreuses fonctions primordiales au sein de l’organisme ! L’idée n’était pas de toutes les lister car l’article serait vite devenu interminable et indigeste.

J’espère pour autant que vous aurez compris à quel point la glycine est un acide aminé important et à quel point la supplémentation en glycine est sous-cotée quand il s’agit de prendre soin de sa santé.

Références scientifiques

(1)     Razak MA, Begum PS, Viswanath B, Rajagopal S. Multifarious Beneficial Effect of Nonessential Amino Acid, Glycine: A Review. Oxid Med Cell Longev. 2017;2017:1716701. doi: 10.1155/2017/1716701. Epub 2017 Mar 1. Erratum in: Oxid Med Cell Longev. 2022 Feb 23;2022:9857645. doi: 10.1155/2022/9857645. PMID: 28337245; PMCID: PMC5350494.

(2)     Aguayo-Cerón KA, Sánchez-Muñoz F, Gutierrez-Rojas RA, Acevedo-Villavicencio LN, Flores-Zarate AV, Huang F, Giacoman-Martinez A, Villafaña S, Romero-Nava R. Glycine: The Smallest Anti-Inflammatory Micronutrient. Int J Mol Sci. 2023 Jul 8;24(14):11236. doi: 10.3390/ijms241411236. PMID: 37510995; PMCID: PMC10379184.

(3)     Meléndez-Hevia E, De Paz-Lugo P, Cornish-Bowden A, Cárdenas ML. A weak link in metabolism: the metabolic capacity for glycine biosynthesis does not satisfy the need for collagen synthesis. J Biosci. 2009 Dec;34(6):853-72. doi: 10.1007/s12038-009-0100-9. PMID: 20093739.

(4)     Bannai M, Kawai N. New therapeutic strategy for amino acid medicine: glycine improves the quality of sleep. J Pharmacol Sci. 2012;118(2):145-8. doi: 10.1254/jphs.11r04fm. Epub 2012 Jan 27. PMID: 22293292.

(5)     Kawai N, Sakai N, Okuro M, Karakawa S, Tsuneyoshi Y, Kawasaki N, Takeda T, Bannai M, Nishino S. The sleep-promoting and hypothermic effects of glycine are mediated by NMDA receptors in the suprachiasmatic nucleus. Neuropsychopharmacology. 2015 May;40(6):1405-16. doi: 10.1038/npp.2014.326. Epub 2014 Dec 23. PMID: 25533534; PMCID: PMC4397399.

(6)     Bannai M, Kawai N, Ono K, Nakahara K, Murakami N. The effects of glycine on subjective daytime performance in partially sleep-restricted healthy volunteers. Front Neurol. 2012 Apr 18;3:61. doi: 10.3389/fneur.2012.00061. PMID: 22529837; PMCID: PMC3328957.

(7)     Kumar P, Liu C, Hsu JW, Chacko S, Minard C, Jahoor F, Sekhar RV. Glycine and N-acetylcysteine (GlyNAC) supplementation in older adults improves glutathione deficiency, oxidative stress, mitochondrial dysfunction, inflammation, insulin resistance, endothelial dysfunction, genotoxicity, muscle strength, and cognition: Results of a pilot clinical trial. Clin Transl Med. 2021 Mar;11(3):e372. doi: 10.1002/ctm2.372. PMID: 33783984; PMCID: PMC8002905.

(8)     Imenshahidi M, Hossenzadeh H. Effects of glycine on metabolic syndrome components: a review. J Endocrinol Invest. 2022 May;45(5):927-939. doi: 10.1007/s40618-021-01720-3. Epub 2022 Jan 11. PMID: 35013990.

(9)     Saklayen MG. The Global Epidemic of the Metabolic Syndrome. Curr Hypertens Rep. 2018 Feb 26;20(2):12. doi: 10.1007/s11906-018-0812-z. PMID: 29480368; PMCID: PMC5866840.